Contexte
Avant 1975, Chum Mey était mécanicien à Phnom Penh.1 Lui et sa famille ont été évacués de Phnom Penh par les Khmers rouges le 17 avril 1975.2 Il a travaillé au sein de coopératives à Phnom Penh en tant que mécanicien de 1975 à 1977,3 puis a été arrêté et envoyé au S-21 le 28 octobre 1978.4 Lorsqu’il a témoigné en 2009, il était âgé de 79 ans, était retraité et habitait à Phnom Penh.5
Chum Mey a comparu comme partie civile dans le dossier n° 001 et a fourni des éléments de preuve sur Kaing Guek Eav, alias Duch.6 Chum Mey a témoigné sur l’évacuation de Phnom Penh, ses expériences de travail au sein de coopératives à Phnom Penh et au S-21, et sur la vie après la chute du régime des Khmers rouges.
L’évacuation de Phnom Penh du 17 avril 1975
Travail au sein des coopératives de Phnom Penh
Chum Mey s’est vu confier le poste de mécanicien au sein de coopératives à Phnom Penh de 1975 à 1977.9 À Russei Keo, on lui a demandé de réparer des bateaux, des voitures et des tracteurs, de conduire des bulldozers et des véhicules dans un ferry et d’embarquer sur le ferry afin d’acheminer les tracteurs et camions sur l’autre rive du fleuve.10 Plus tard, il a été transféré à Orussei parce qu’il connaissait les pièces détachées des tracteurs.11 À Orussei, on l’a chargé de collecter des outils dans des maisons et de les stocker à l’entrepôt, de réparer des haut-parleurs et de rassembler des machines à coudre pour confectionner des vêtements noirs.12
Conditions au sein du S-21
Chum Mey – qui a été détenu avec 12 272 personnes en vertu de la liste révisée des prisonniers du S-21 – est l’un des rares survivants du centre.13 Chum Mey a été arrêté le 28 octobre 1978 et interné au S-21 à la même date.14 Il a d’abord été gardé dans une maison en face du S-21 et a ensuite été menotté et emmené les yeux bandés au bâtiment du S-21.15 Il a été emmené dans une pièce, photographié, pesé et interrogé sur sa biographie ; on l’a mesuré et on lui a fait retirer sa chemise, son pantalon et ses souliers, le laissant en short.16 Ensuite, on lui a lié les mains derrière le dos et on lui a remis un bandeau sur les yeux. Il a été mis en cellule individuelle où il a été entravé, toujours les yeux bandés.17 Il a mangé, il a dormi et a fait ses besoins dans la cellule individuelle, puis commune,18 et a estimé profondément humiliant de devoir se soulager en présence d’autres personnes.19 Chum Mey a ensuite été interrogé durant douze jours et douze nuits et a été traité comme un animal jusqu’à ce qu’il avoue faire partie de la CIA et du KGB, même s’il ne savait rien de ces organisations-là.20 Lors de son interrogatoire, il a été forcé à s’asseoir à même le sol les jambes entravées et a été battu chaque jour et chaque nuit.21 Il a eu un doigt cassé alors qu’il essayait de se protéger des coups.22 On lui a tordu les ongles des deux gros orteils avec des pinces et complètement arrachés.23 Il a été électrisé à deux reprises, et un câble électrique a été placé dans son oreille jusqu’à ce qu’il perde connaissance.24 Après sa confession, il a été placé dans une cellule collective sans aucun soin pour ses blessures et a été entravé sur une longue barre en compagnie d’environ 40 autres codétenus.25 Durant la journée, il était libéré de ses entraves pour réparer des machines, surveiller le feu pour cuire la bouillie et enseigner aux femmes comment réparer les machines.26 Pendant la nuit, il était emmené vers la cellule commune et à nouveau entravé avec les autres prisonniers.27 La Chambre de première instance a conclu à la crédibilité du témoignage de Chum Mey et s’est appuyée sur ce témoignage pour étayer ses conclusions sur le S-21.28
La vie après la chute du régime khmer rouge
Après la chute des Khmers rouges, Chum Mey a été extrait du S-21 par des gardes et a retrouvé sa femme et son enfant.29 Lui et sa famille et d’autres ont d’abord été les cibles de tirs par les Vietnamiens,30 et ensuite par les soldats khmers rouges.31 Son fils et sa femme sont morts, mais il a survécu à la fusillade.32 Par la suite, il a rencontré une femme qui est devenue son épouse, et s’est caché avec elle.33
Déclaration de préjudice
Chum Mey a témoigné : “Chaque fois que j'entends Ie mot ou que je pense au mot Tuol Sleng, je ne peux retenir mes lamres qui coulent automatiquement. Chaque jour, quand j'entends parler de S-21, quand j'entends parler de Tuol Sleng, quand j'entends parler de tortures, je ne peux que pleurer. Et je ne sais pas ce qui va m'arriver à l'avenir car je ne peux pas me contrôler, je ne peux pas maîtriser ces larmes quand j'entends ces mots. [...] [Des représentants de l'Organisation Transculturelle Psychosociale (« TPO ») m'ont] expliqué que c'est la colère et Ie traumatisme enduré sous Ie régime Khmer rouge qui font que je dois essayer de ne pas succomber à ces sentiments. Mais quoi que je fasse, quoi que j'essaye, je ne peux retenir mes larmes.”34 La Chambre de première instance a conclu que les coups portés au S-21 entraînaient des traumatismes multiples tels que des fractures, des pertes d’audition, des chutes de dents, des cicatrices et parfois la mort, et que l’électrisation entraînait chez les détenus des pertes de conscience et les rendait parfois impuissants, les faisait sombrer dans la folie ou entraînait leur mort.35
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Date | Procès-verbal d’audience | Numéro de transcription |
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30 juin 2009 | E1/40 | E1/40.1 |
Titre du document en khmer | Titre du document en anglais | Titre du document en français | Numéro de document D | Document numéro E3 |
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កំណត់ហេតុនៃការស្តាប់ចម្លើយរបស់ ជុំ ម៉ាញ ហៅ ម៉ី | Written Record of Interview of CHUM Manh, alias Mei | Procès-verbal de l’audition de CHUM Manh, alias Mei | D2-4 | E3/387 |